Dommage causé aux tiers par un manquement contractuel

15 décembre 2017

Civ. 3, 18 mai 2017, pourvoi n° 16-11203 à paraître au Bulletin

Il ressort de cet arrêt que la possibilité pour un tiers au contrat de se prévaloir, sur le fondement délictuel, d’un manquement contractuel lui ayant causé un préjudice ne saurait résulter du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vice.

En l’occurrence, la cour d’appel avait déclaré un entrepreneur responsable de la condensation anormale apparue – suite à des travaux commandés par le locataire d’un des copropriétaires et le syndicat des copropriétaires – dans le lot appartenant à un autre copropriétaire et que ce dernier louait à un autre locataire, motifs pris de ce qu’« il résulte de la convention du 5 avril 2004 que la société F… et la société D… se sont engagées solidairement à l’égard de la société S… à livrer un ouvrage conforme aux prévisions contractuelles et exempt de vices, qu’en manquant à cette obligation, la société D… a commis une faute à l’origine de la condensation anormale et que cette faute engage sa responsabilité délictuelle à l’égard de la SCI H… et de la société A… ».

Selon la Haute juridiction, « en statuant ainsi, par des motifs qui, tirés du seul manquement à une obligation contractuelle de résultat de livrer un ouvrage conforme et exempt de vices, sont impropres à caractériser une faute délictuelle », les juges d’appel ont violé l’article 1382, devenu 1240, du code civil.

Il se déduisait de l’arrêt censuré que, d’un point de vue technique, le maître d’œuvre n’avait pas commis de faute liée aux désordres invoqués. Par son arrêt, la troisième chambre civile manifeste un refus d’étendre à la notion d’obligation de résultat la solution retenue par l’assemblée plénière dans son arrêt du 6 octobre 2006, en vertu de laquelle « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage » (Assemblée plénière, 6 octobre 2006, Bull., Ass. plén., n° 9). En somme, si la faute contractuelle reste assimilée à une faute délictuelle, encore faut-il établir la matérialité de celle-ci ainsi que son lien de causalité avec le dommage allégué.

Cette solution semble devoir être rapprochée de celle dégagée dans un arrêt de la première chambre civile, qui a semblablement affirmé que les agences de voyage n’assument pas, à l’égard des victimes par ricochet, la responsabilité de plein droit édictée par l’article L. 211-16 du code du tourisme, lequel instaure une telle responsabilité légale au seul profit de l’acheteur du voyage (cf. Civ. 1, 28 septembre 2016, pourvoi n° 15-17.033, à paraître au Bulletin).

Par ces décisions, la Cour de cassation s’attache à endiguer le domaine d’application des obligations de résultat comme des présomptions légales de responsabilité.