Commandement de payer valant saisie immobilière. Contrôle par le juge du caractère nécessaire de la mesure de saisie / Action en déchéance des intérêts. Prescription.

Cass. 2ème civ. 1er février 2018, pourvoi n°16-26.679

Aux termes de l’article L. 111-7 du code des procédures civiles d’exécution : « Le créancier a le choix des mesures propres à assurer l’exécution ou la conservation de sa créance. L’exécution de ces mesures ne peut excéder ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation » L’article L 121-2 du même code dispose par ailleurs que « le juge de l’exécution a le pouvoir d’ordonner la mainlevée de toute mesure inutile ou abusive et de condamner le créancier à des dommages- intérêts en cas d’abus de saisie ». Il s’en déduit que le juge de l’exécution apparaît ainsi comme le garant de la nécessité réelle de la mesure, et du fait qu’elle n’a pas été entreprise dans un but frustratoire ou de mauvaise foi.

Dans cette perspective, la jurisprudence considère qu’une mesure est inutile lorsque, en dehors de toute idée de faute, elle ne sert à rien et n’ajoute rien à la sauvegarde des droits du créancier. Il appartient alors au débiteur qui poursuit la mainlevée d’une mesure d’exécution, d’établir qu’elle excède ce qui se révèle nécessaire pour obtenir le paiement de l’obligation.

L’arrêt vient rappeler ces principes dans une espèce où la valeur du bien objet de la saisie pouvait paraître bien supérieure au montant des créances demeurées impayées. La Deuxième chambre civile précise néanmoins qu’il ne suffit pas au débiteur saisi de procéder par voie d’affirmation et qu’il doit justifier in concreto du caractère excessif de la mesure.

Dans cette même espèce, il était reproché aux juges du fond d’avoir rejeté comme prescrite l’action en déchéance des intérêts fondée sur l’irrégularité du taux effectif global tirée du défaut de mention du taux de période, après avoir énoncé dans les motifs de leur décision que l’article R. 313-1 du code de la consommation n’était pas applicable pour les crédits immobiliers. Examiné isolément, ce motif était discutable dans la mesure où l’obligation de communiquer à l’emprunteur le taux de période et la durée de la période, pour la détermination du taux effectif global, paraît s’appliquer aux prêts conclus pour financer l’acquisition d’un immeuble. Mais la critique ainsi adressée à l’arrêt a été écartée par la Haute juridiction comme portant sur un motif surabondant.

Le demandeur au pourvoi rappelait par ailleurs qu’en cas d’octroi d’un crédit à un consommateur ou à un non professionnel, la prescription de l’action en nullité de l’intérêt conventionnel engagée par celui-ci en raison d’une erreur affectant le taux effectif global court seulement à compter de la date de la révélation de l’erreur à l’emprunteur, sauf si la teneur de l’acte de prêt permettait à ce lecteur profane de la déceler aisément d’emblée (cf. Cass. 1ère civ.  1er mars 2017, pourvoi n° 16-10.142). Il en était déduit « que la cour d’appel a fait courir le délai de prescription à compter de la date du prêt, conclu le 30 avril 2008, en retenant qu’il ressortait de l’acte que le taux de période n’y était pas mentionné ; qu’en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que M. X… pouvait se convaincre lui-même, à la lecture de l’acte de prêt, d’une erreur affectant le taux effectif global, ce qui aurait supposé qu’il sache que le taux de période devait être mentionné, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1304 et 1907 du code civil, ensemble les articles L. 312-2 et R. 313-1 du code de la consommation, les deux derniers dans leur rédaction applicable à la cause ». Ce moyen a été écarté en ces termes : « Mais attendu qu’ayant souverainement constaté que les énonciations de l’acte notarié de prêt permettaient de se convaincre de l’absence de mention du taux de période et de la durée de période, ce dont elle a exactement déduit que la prescription de l’action en annulation de la stipulation d’intérêts résultant du taux effectif global (TEG) avait commencé à courir à la date de signature dudit acte, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ».